Bâtir une industrie résiliente et indépendante, au plus près des territoires
Affichée par le gouvernement comme le levier clé de notre « souveraineté industrielle », la relocalisation des entreprises fait partie du vaste plan de relance engagé par l’Etat. 15 Mds d’euros seront mis sur la table pour soutenir les projets d’innovation et de relocalisation (dont 1 Mds euros d’aides directes construites avec les industriels).
Il est vrai que la crise sanitaire a dramatiquement mis en exergue la forte dépendance industrielle et technologique de la France, ainsi que la fragilité de certaines chaînes de valeurs. Dès lors, le thème de la relocalisation est revenu sur le devant de la scène. Pour mieux comprendre le phénomène, un flashback s’impose. La France a entamé son processus de désindustrialisation dans les années 70, au lendemain des chocs pétroliers. Depuis, elle n’a eu de cesse de s’engager dans cette voie, contrairement à son voisin allemand, qui a souhaité reprendre les rênes de sa souveraineté industrielle dans les années 90.
Le fabless ne fait plus recette
La Covid-19 a pointé du doigt la nécessité de disposer d’une chaîne d’approvisionnement résiliente et agile, afin de mieux réagir aux risques. La mode du « Fabless » et des usines à l’autre bout de la planète ne font plus recette, car les acteurs industriels ont compris que délocaliser leurs productions n’était pas sans risques.
Dans le cadre de son Plan de Relance, le gouvernement souhaite donc renforcer la production nationale et soutenir la relocalisation.
Au-delà de la constitution de stocks stratégiques ou de la réorganisation des chaînes d’approvisionnement, la priorité est donnée à certains territoires, qui font aujourd’hui figure de véritables déserts industriels. Ce sont précisément ces territoires que l’industrie doit soutenir afin de les aider à retrouver leur attractivité perdue.
Entretien avec Olivier Lluansi
"La réindustrialisation doit se faire au nom de la cohésion du pays"
Premier Délégué aux Territoires d’industrie, Olivier Lluansi a été chargé en 2019 de coordonner le déploiement de cette initiative lancée par le Premier ministre et visant à dynamiser la réindustrialisation des territoires.
Pourquoi les Territoires d’industrie ?
Les Territoires d’industrie sont l’une des plus récentes « briques » de politiques industrielles développées en France depuis les États généraux de l’industrie de 2009, eux-mêmes suivis des deux phases de la Nouvelle France Industrielle, articulée autour de l’usine puis de l’industrie « du futur ». Enfin, le Pacte productif, annoncé par Emmanuel Macron en avril 2019, a vocation à construire un nouveau modèle français décarboné permettant d’atteindre le plein-emploi. En fait, on commence à peine à réaliser l’ampleur, notamment sociétale, de la désindustrialisation qui a commencé au milieu des années 1970. Elle est responsable de la destruction de 20 % des emplois français en quelques décennies, et, dans certaines régions, ce chiffre atteint même 30 %. En outre, cette période a profondément abîmé l’image de l’industrie.
Quel est le principal objectif de la réindustrialisation ?
C’est en effet LA question. Il manque aujourd’hui une clé de voûte aux politiques industrielles dont nous nous sommes dotés, une ambition qui dépasse l’objet lui-même. On ne réindustrialise pas pour réindustrialiser… Alors pourquoi réindustrialiser ? Au nom de la cohésion du pays et de l’équilibre territorial, qui ne fonctionne que si l’on redistribue la richesse ! Il est indispensable, grâce à l’industrie, de pérenniser l’emploi et de rouvrir la porte à des territoires aujourd’hui exclus de la mondialisation et des services à valeur ajoutée. Ces derniers ont en effet été réservés aux métropoles et aux grandes villes. A l’exception peut-être de quelques territoires à l’exclusion de quelques-uns qui peuvent miser sur le tourisme, l’économie résidentielle et la silver economy, ces services ont en effet été réservés aux métropoles et aux grandes villes.
Qu’avez-vous constaté au cours de votre mission ?
D’abord, une profonde envie d’industrie, plus forte qu’imaginée, pour les raisons évoquées ci-dessus. Les territoires ne manquent pas de projets, d’idées ou de ressources financières, mais d’ingénierie, financière et de projet. Plus qu’un enjeu de compétitivité, ils sont confrontés à un déficit d’attractivité pour faire venir des talents. Les métiers industriels sont pourtant majoritairement devenus de la haute technologie, bien loin des histoires de Chaplin et de Zola, et cette cicatrice liée à leur image peut désormais être cautérisée assez rapidement. Les usines, qui s’étaient refermées sur elles-mêmes, s’ouvrent aujourd’hui à leurs clients, aux start-up et aux établissements d’enseignement de proximité, et même aux citoyens, de plus en plus séduits par le tourisme industriel. L’aménagement du territoire est un processus de plus longue haleine. Quant à la puissance des écosystèmes locaux, déterminante dans la création d’emplois, elle repose d’abord sur des individus pétris de l’envie de développer leur territoire, davantage que sur un des critères socio-économiques.
Réindustrialiser les territoires
Aujourd’hui, l’industrie française a toutes les cartes en main pour participer à la revitalisation des territoires. Revitaliser les territoires, c’est apporter des réponses pertinentes aux enjeux de développement durable, et le secteur industriel peut contribuer à cette transformation. Sa participation grandissante à la restauration des espaces naturels autour des sites de production témoigne de ce nouvel engagement en faveur de la préservation de la biodiversité.
Revitaliser les territoires, c’est aussi redonner la préférence aux circuits courts, aux fournisseurs locaux, aux savoir-faire en proximité, avec le déploiement de sites de production de petites tailles, capables d’achalander un marché à l’échelle d’une région. A la clé, des territoires désenclavés et revitalisés mais aussi un bassin d’emploi redynamisé. Du reste, ce développement de l’emploi local pourrait être étayé en tissant des liens privilégiés avec les établissements d’enseignement supérieur, les laboratoires de recherche ou les start-up du territoire.
Ainsi, les défis de l’industrie du futur sont pluriels, liés à la fois à l’attractivité des territoires, la transition énergétique et le maintien de l’emploi.
Tournées vers la relocalisation verte, les solutions proposées par ENGIE Solutions répondent point par point à ces enjeux multiples. Grâce à notre accompagnement ciblé et sur-mesure, vous pouvez vous engager dans cette transition, qui offre des perspectives prometteuses et permet de concilier performance, emploi et préservation de l’environnement.
Le programme d’accélération des projets industriels territoriaux
Ce programme vise à soutenir les projets industriels structurants pour le territoire : créations de sites, extensions, modernisations, nouveaux équipements...
Une industrie qui favorise les synergies
Et si la relocalisation de l’industrie permettait aux industriels de réaliser des économies d’échelle ? L’utilisation des nouvelles technologies, et notamment du Big Data et de l’intelligence artificielle, devrait favoriser les synergies et faire naître de nouvelles collaborations entre les acteurs industriels. En effet, la multitude de données liée à un territoire s’avère une mine d’or pour adapter, par exemple, la production d’énergie au plus près des besoins réels. De même, on peut imaginer de mutualiser les ressources énergétique ou de transformer les déchets des uns ( eaux industrielles, chaleur fatale…) en ressources pour les autres. Un exemple ? La vapeur rejetée par une papèterie pourrait servir à alimenter les turbines d’une centrale d’électricité.
En soi, cette nouvelle collaboration industrielle ne raisonne plus en filières comme autrefois, mais plutôt en écosystèmes locaux, dans lesquels se déploient une mutualisation des forces et des ressources industrielles au service de tous.